Addictions et Travail

Des consommations occasionnelles ou répétées d’alcool, de cannabis ou de médicaments peuvent mettre en danger la santé et la sécurité des salariés, et notamment être à l’origine d’accidents du travail. La prévention et la prise en charge des addictions est donc nécessaire dans les entreprises. Ce dossier fait le point sur les addictions en France et les risques professionnels occasionnés, ainsi que sur le contexte réglementaire existant. Il détaille la stratégie à mettre en place dans les entreprises, qui passe par l’élaboration d’une démarche collective sans négliger la prise en charge individuelle.

Ce qu’il faut retenir

Etat des lieux des addictions

Addictions et risques professionnels

Démarche de prévention : du collectif à l’individuel
Construire une démarche collective
Assurer la promotion et la pérennité de la démarche
Repérer les situations individuelles et savoir réagir
Contexte réglementaire
Employeur : obligation de sécurité et responsabilités
Salarié : obligation de sécurité et responsabilités
Contrôle et dépistage
Retrait du poste
Ethique et non-discrimination
Pour en savoir plus en quelques clics

Autres références bibliographiques

Ce qu’il faut retenir

On observe aujourd’hui au niveau mondial une augmentation des consommations d’alcool, de médicaments ou de drogues (cannabis notamment). On observe également chez les usagers de ces produits une multiplication des polyconsommations, c’est-à-dire une consommation de plusieurs produits à la fois (les combinaisons courantes étant sur la base d’alcool et/ou tabac, cannabis, médicament).

L’addiction se caractérise par la dépendance, c’est-à-dire l’impossibilité répétée de contrôler un comportement et la poursuite de ce comportement en dépit de la connaissance des conséquences négatives. Il existe des conduites addictives avec produits (alcool, tabac, drogues ou substances psychoactives) ou sans produit (workaholisme notamment).

Augmentation des consommations

Quelques définitions à connaître concernant les addictions
Usage
Consommation occasionnelle ou régulière pouvant comporter ou non des risques pour la santé.

Abus ou usage nocif
Mode de consommation nocif pour la santé, pouvant entraîner des complications physiques ou psychiques.

Dépendance
Ensemble de phénomènes comportementaux, cognitifs et physiologiques survenant à la suite d’une consommation répétée d’une substance psychoactive : désir puissant de consommation du produit, difficulté à contrôler la consommation, poursuite de la consommation malgré la connaissance des effets nocifs pour la santé, effet de « manque » en cas de non consommation, désinvestissement progressif des activités professionnelles, sociales et/ou familiales…

Substance psychoactive
Substance modifiant le fonctionnement psychique : alcool, amphétamines et produits dérivés, caféine, cannabis, hallucinogènes, nicotine (tabac), opiacés, sédatifs, hypnotiques et anxiolytiques, solvants volatils… Cet effet est soit recherché (cas des « médicaments psychotropes » et des « drogues »), soit non recherché (effets secondaires de médicaments non psychotropes ou exposition professionnelle à un solvant par exemple).

Médicament psychotrope
Substance chimique d’origine naturelle ou artificielle susceptible de modifier l’activité mentale. Il peut s’agir d’anxiolytiques (tranquillisants), de somnifères, de neuroleptiques, d’anti-dépresseurs, de traitements de substitution (méthadone ou buprémorphine)…

Drogue
Substance naturelle ou de synthèse dont les effets psychotropes suscitent des sensations apparentées au plaisir, incitant à un usage répétitif pouvant aller jusqu’à l’asservissement ou à une addiction, visant à éviter un syndrome de manque.

Stupéfiant ou drogue illicite
Substance dont l’usage ou le trafic est réprimé par la loi (loi n° 70-1320 du 31 décembre 1970). La liste de ces substances illicites comporte notamment le cannabis, la cocaïne, les opiacés, l’ecstasy…

Etat ébrieux
Altération des sens (perception de l’environnement et du temps, vision, équilibre…) due à une consommation occasionnelle ou répétée d’alcool ou d’autres substances psychoactives : excitation, irritabilité, troubles de coordination des mouvements, de l’équilibre et/ou de la vision… jusqu’à l’inconscience prolongée. Le terme d’état pseudo-ébrieux est utilisé pour désigner un état en rapport avec une maladie qui provoque des symptômes ressemblant à ceux de l’ivresse (hypoglycémie, certaines maladies neurologiques…).

Qu’il s’agisse d’information ou de prévention, de prise en charge ou de répression, la question des addictions est prise en considération par la société française. Citons par exemple la loi de 1970 réprimant l’usage et le trafic de stupéfiants, deux plans successifs de lutte contre les addictions, les lois anti-tabac (lieux publics ou professionnels), le renforcement des peines en sécurité routière en cas de conduite en état ébrieux (consommation d’alcool ou de cannabis)…

Cependant, depuis 1970, le nombre de consommateurs de substances psychoactives aurait été multiplié par dix ou vingt en France. Et bien souvent, les consommations se cumulent.

L’alcool et les médicaments font partie des substances les plus consommées en France

Nombre de personnes en France consommant régulièrement du tabac, de l’alcool, des médicaments psychotropes ou du cannabis
Alcool 13,1 millions
Tabac 13 millions
Médicaments psychotropes 3,8 millions
Cannabis 850 000
Données de 2003 publiées par l’Office français des drogues et des toxicomanies (OFDT), « régulièrement » signifiant 10 usages ou plus au cours des 30 derniers jours

Face à cette augmentation des consommations, le plan addictions établi pour 2007-2011 par le gouvernement français a notamment pour objectifs une meilleure prévention et une amélioration de la prise en charge. La lutte contre les addictions mobilise également un grand nombre d’acteurs en Europe (stratégie anti-drogue adoptée pour l’Union européenne).

Les problèmes posés par des consommations occasionnelles ou répétées de substances psychoactives (alcool, cannabis, médicaments…) sont également préoccupants pour l’ensemble des entreprises françaises. Ils concernent tous les secteurs d’activité, et tous les salariés, quel que soit leur niveau hiérarchique. En effet, ces consommations peuvent mettre en danger la santé et la sécurité des salariés, et notamment être à l’origine d’accidents du travail (modification de la perception du risque et/ou prise de risque, perte d’attention ou de vigilance, mise en danger du salarié lui-même ou de ses collègues…).
La prévention et la prise en charge des addictions sont donc nécessaires dans les entreprises. Cette problématique de santé et de sécurité au travail doit passer par l’élaboration d’une démarche collective, sans négliger la prise en charge individuelle. Il faut notamment aboutir à un protocole accepté par tous dans l’entreprise précisant les modes d’intervention, les moyens à mettre en œuvre, les limites et les rôles de chacun sur tous les points suivants : dépistage, suivi, prise en charge, retrait ou maintien au poste dans quelles conditions, sanctions éventuelles.

Etat des lieux des addictions

L’addiction se caractérise par la dépendance, soit l’impossibilité répétée de contrôler un comportement et la poursuite de ce comportement en dépit de la connaissance des conséquences négatives. Une conduite addictive peut être liée à des produits (alcool, tabac, drogues ou substances psychoactives) ou non. En effet, d’autres formes d’addictions, sans prise de produit, sont décrites par différents auteurs, comme le workaholisme (les « accros » au travail), la dépendance aux moyens de communication (internet et e-mail, téléphone portable…), le jeu pathologique…

Les addictions sont, en France comme dans beaucoup d’autres pays européens, un problème de santé publique majeur, dont les impacts sont multiples, sanitaires, médicaux et sociaux.

Un mécanisme de dépendance
La proportion de jeunes (un tiers des adolescents de 17-18 ans) consommant de l’alcool et/ou du cannabis est préoccupante.
Les addictions atteignent gravement ceux qui en dépendent, mais aussi leur entourage et l’ensemble de la société. Elles sont aussi souvent à l’origine de handicaps, d’isolement, de violence et de précarité.
Les conduites addictives, notamment les consommations de tabac, les abus d’alcool et dans une moindre mesure, les substances psychoactives, interviennent ainsi dans 30 % de la mortalité précoce (avant 65 ans). Les addictions aux substances psychoactives sont responsables en France de plus de 100 000 décès évitables par accidents et par maladies dont près de 40 000 par cancers.

Addictions avec produits
La classification internationale des maladies (CIM 10) consacre un chapitre aux troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives. Neuf produits figurent notamment dans cette classification : alcool, opiacés, dérivés du cannabis, sédatifs ou hypnotiques, cocaïne, stimulants y compris la caféine, hallucinogènes, tabac, solvants volatils. La polyconsommation fait l’objet d’une catégorie à part.

Principaux produits pouvant conduire à des addictions
Type de substance
Nom ou famille
Principaux effets et risques

Substances
autorisées

Tabac

Cancers du poumon, de la vessie, de l’appareil digestif et de la sphère ORL
Bronchite chronique
Asthme
Pathologies cardiovasculaires…

Alcool (éthanol)
Diminution de vigilance et des réflexes
Ebriété, perte de contrôle avec passages à l’acte violents, accidents du travail et de la route
Coma éthylique en cas d’absorption massive
A long terme, cirrhose du foie, cancer de l’œsophage et atteintes d’autres organes (notamment le système nerveux central et périphérique)

Médicaments (anxiolytiques, somnifères, anti-dépresseurs…)

Variables suivant la classe médicamenteuse (somnolence, modifications du comportement, troubles de la mémoire, troubles des capacités motrices…)

Substances
illicites

Cannabis
Etat ébrieux (altérations de la vigilance, excitation)
Modifications de l’humeur
Troubles des perceptions (vue, ouïe…)
Hallucinations visuelles, auditives et corporelles
Effet cancérogène avéré (voies aéro-digestives supérieures et appareil respiratoire)
Troubles psychiatriques

Autres drogues
(cocaïne, opiacés, ecstasy…)

Variables suivant les produits (hallucinations, troubles psychiatriques, accidents cardiaques, violence, baisse de la vigilance, troubles respiratoires, infections virales ou/et bactériennes…)
Précisons que la durée et l’intensité des effets varient suivant les produits, la quantité consommée et la régularité de la consommation.
Rappelons que l’exposition professionnelle à certains produits chimiques comme les solvants peut provoquer un état pseudo-ébrieux.

Pour plus d’informations sur ces produits et leurs effets, consultez :
l’article paru dans les Documents pour le médecin du travail « Dépistage des substances psychoactives » (TM 2)
le site Drogues et dépendances www.drogues-dependances.fr
Addictions sans produit
D’autres formes d’addictions sans prise de produit sont décrites dans la littérature : workaholisme (ou encore présentéisme), dépendance aux moyens de communications (internet et e-mail, téléphone portable…), jeu pathologique… Seul le workaholisme est abordé ici : il peut en effet être à l’origine de risques professionnels.

Le terme de workaholisme existe depuis les années 1970. Mais déjà au début du XXe siècle, la « névrose du dimanche » était décrite par un élève de Freud. Les « drogués du travail » ont peur de l’inactivité, qui les met face à leurs émotions et à leurs angoisses. Ce sont également des personnes en recherche de défis permanents : un travail hyper-sollicitant leur procure dans un premier temps plaisir et satisfaction, mais à terme les rend dépendants.
Certains contextes organisationnels d’efficacité à tout prix (culture de l’excellence) peuvent expliquer le phénomène. Sont également évoqués des objectifs fixés trop élevés ou des contextes particuliers de précarité professionnelle (menace de fermeture d’entreprise, plan de restructuration, fusion d’entreprise avec réduction de personnel, travail temporaire et recherche de stabilité professionnelle…).

Le workaholisme se caractérise donc par une présence abusive ou une recherche frénétique de la performance ou de la productivité. L’état pathologique de dépendance auquel il conduit peut avoir des conséquences sur la personne et/ou sur son entourage professionnel ou familial. Il peut être à l’origine de stress, de surmenage, d’épuisement professionnel, voire de pression ou de harcèlement professionnel pour les collaborateurs.

Ce phénomène est pris aujourd’hui très au sérieux dans certains pays : des programmes de sensibilisation collective ont été mis sur pied. Des approches de prise en charge individuelle ont également été élaborées, reposant essentiellement sur des psychothérapies comportementales (évaluation des comportements au travail, repérage des facteurs déclenchants…). L’objectif principal de ces approches collectives et individuelles est d’aider le travailleur « compulsif » à réapprendre à aimer le temps libre et à prendre soin de lui.

Quelques facteurs mis en cause dans les addictions
Une addiction résulte d’une conjonction variable suivant les individus de différents facteurs :
psychologiques,
biologiques (mécanisme de récompense / plaisir),
sociaux (pratiques et cultures d’un environnement privé ou professionnel, isolement, stratégies d’évitement ou d’adaptation…).
Parmi les facteurs psychologiques, on peut citer l’attrait pour l’inconnu, la recherche de plaisir ou de bien-être, le désir d’enrichir son expérience, le besoin de compensation ou de faire face à des situations difficiles (professionnelles ou privées)…

Au niveau biologique, c’est le « système de récompense » de l’organisme qui est à l’origine de la dépendance. La consommation de certains produits procure une sensation agréable qui stimule la production de neurotransmetteurs dans le cerveau, entraînant une augmentation de la dopamine (hormone du plaisir). Toutes les drogues mais aussi certains comportements (workaholisme, jeu pathologique…) agissent directement sur les cellules du cerveau qui produisent la dopamine. Ce « plaisir facile » est aussitôt mémorisé comme un moyen de contrer les sensations désagréables. Il court-circuite en quelque sorte le fonctionnement cérébral habituel. Avec le temps, le cerveau s’habitue à ces concentrations élevées de dopamine qui deviennent indispensables. Cela entraîne la prise de produit ou un comportement. L’individu est alors « prisonnier » du produit ou d’un comportement, seul capable de lui procurer du plaisir.

Au niveau social, l’environnement privé (isolement, ennui, incompréhension, mal-être, hostilité de l’environnement…) peut constituer un facteur. Par ailleurs, pour compenser ou mieux faire face à des conditions de travail perçues comme difficiles (contraintes fortes de productivité, travail posté, travail isolé, postes de travail à risques élevés ou à fortes responsabilités…), un individu ou un collectif de travail peut être amené à croire que la consommation occasionnelle d’alcool, de médicaments, ou de cannabis peut l’aider à se sentir mieux ou à être en mesure de tenir son poste.
Cette stratégie d’adaptation, conjuguée avec les facteurs individuels développés plus haut (psychologiques, biologiques), peut ainsi le conduire à une conduite addictive.

Addiction : une stratégie d’adaptation ?
Une stratégie d’adaptation (dite stratégie de « coping ») permet de faire face à des fortes contraintes ou des situations difficiles. Il peut s’agir par exemple :

de recourir à une « automédication » (s’aider à passer le cap en consommant de l’alcool, des médicaments, du cannabis),
de modifier son comportement pour faire diversion (comportement compulsif comme la boulimie),
d’adopter des solutions de contournement (par exemple écoute systématique de musique permettant de maintenir un seuil de vigilance…).
Les réactions ou modalités d’adaptation sont non prévisibles : elles dépendent de la personne, de ses caractéristiques, et de son environnement.

Grandes orientations politiques en France concernant les addictions
Depuis près de quarante ans, une loi définit le cadre légal dans lequel s’inscrit la politique française de lutte contre la drogue (loi n° 70-1320 du 31 décembre 1970, codifiée au livre IV de la troisième partie du Code de la santé publique). Cette loi réprime l’usage et le trafic de stupéfiants, en distinguant clairement ces deux aspects. Elle fait référence aux substances stupéfiantes inscrites dans une liste déterminée par la Commission des stupéfiants et psychotropes, en accord avec la réglementation internationale.
Cette loi a été récemment modifiée : un usager de stupéfiants peut être contraint à se soigner ou se faire suivre par le juge d’instruction ou le Procureur de la République et un dépistage de la toxicomanie dans les entreprises ou établissements effectuant des transports publics peut être effectué par la police judiciaire (loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance parue au Journal officiel du 7 mars 2007, consultable sur www.legifrance.gouv.fr).

Des plans de lutte contre les addictions ont également été mis en place pour répondre de façon globale à ce problème de santé publique majeur, notamment en ce qui concerne la prévention :
Plan MILDT 2004-2008
Le plan de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) développe un certain nombre d’orientations à mettre en oeuvre. Il prévoit notamment de diversifier et de mieux adapter l’offre de soins en réponse aux addictions, de renforcer la coopération internationale et européenne, et d’intensifier les efforts en matière de recherche.
Plan gouvernemental addiction 2007-2011
Ce plan porte sur la prise en charge et la prévention des addictions. Il devrait permettre de renforcer et coordonner les dispositifs existants et de développer les ressources à toutes les étapes de la prise en charge (prévention, dépistage, soins et accompagnement médico-social). La formation des médecins du travail est envisagée dans ce plan (priorité 5 / objectif 12 / mesure 22).
Pour toute question sur ce plan, un numéro indigo d’accès unique sur les addictions a été mis en place (08 20 03 33 33).

Pour en savoir plus, consultez le site du Plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites.

Addictions et risques professionnels

Les entreprises sont concernées par les addictions en raison de leur ampleur, de leurs implications en matière de santé et sécurité au travail et de prévention des risques professionnels.
En effet, la présence de salariés en état d’ébriété ou sous l’emprise de drogues sur le lieu de travail peut mettre en danger la santé et la sécurité des salariés, à la fois pour eux-mêmes et pour leur entourage. L’altération de la vigilance, la modification de la perception du risque et/ou une prise de risque accrue peuvent ainsi être à l’origine d’accidents du travail.

Tous les secteurs d’activité sont concernés. Cependant, certains secteurs ou postes de travail à fortes contraintes ont fait l’objet d’études spécifiques. C’est notamment le cas du travail posté, du travail de nuit et du travail isolé, des postes à responsabilités élevées, des postes à forte exigence en termes de vigilance (contrôle de processus sur les sites à hauts risques notamment, postes de surveillance ou de gardiennage), tout ce qui touche à la conduite ou au pilotage (transports, manutention mécanique)…
Il semblerait notamment que les consommations soient plus élevées ou plus fréquentes chez les personnes qui sont affectées à des postes à risque.

Démarche de prévention : du collectif à l’individuel

La santé et la sécurité des personnes sur le lieu de travail peuvent être mises en danger par la présence de salariés en état d’ébriété ou ayant consommé des substances psychoactives. La prévention et la prise en charge des addictions sont donc nécessaires dans les entreprises. La stratégie à mettre en place passe par l’élaboration d’une démarche collective, sans négliger la prise en charge individuelle. Il faut notamment aboutir à un protocole accepté par tous dans l’entreprise : les modes d’intervention, les moyens à mettre en œuvre, les limites et les rôles de chacun doivent être connus. Et des actions d’information et de sensibilisation doivent être menées : il est notamment important de faire tomber les idées fausses et/ou les tabous sur les addictions.
Cette démarche sera d’autant plus acceptée par le collectif de travail qu’elle aura été élaborée dans un esprit d’accompagnement et de soutien.

Elaborer une démarche collective sans négliger la prise en charge individuelle

Construire une démarche collective
Dans tous les cas, il est nécessaire de construire une démarche collective, et pas seulement pour les salariés qui ont un problème ou sont susceptibles d’en avoir un. Celle-ci sera d’autant mieux acceptée et appliquée que la direction et l’ensemble des salariés, des représentants du personnel et de l’encadrement auront été associés à son élaboration.

Comment construire une démarche collective concernant les addictions au travail ?
Mettre en place un comité de pilotage représentatif de l’ensemble du personnel qui va élaborer la démarche et communiquer à toutes les étapes de l’avancement des travaux

Faire un constat préalable accepté par tous afin d’éviter tout déni possible

Tenir compte par exemple d’une pratique existante de prévention en matière d’addictions et de la culture générale de prévention des risques dans l’entreprise, des habitudes culturelles notamment en matière de consommation, des conditions de travail, du vécu et de la perception des salariés vis-à-vis des addictions en général
Dresser un bilan de « l’état social » de l’entreprise et des outils de gestion des ressources humaines existants
Evaluer le risque « addictions » dans l’entreprise et l’inscrire le cas échéant dans le document unique

Construire en concertation une charte d’intervention

Définir précisément la conduite tenue par l’entreprise pour tout ce qui concerne le suivi, la prise en charge, le retrait du poste et le dépistage ou le contrôle dans une situation où il y a mise en danger possible
Convaincre qu’il est nécessaire d’intervenir le plus tôt possible afin d’éviter des situations requérant des réponses lourdes ou complexes
Tirer profit des retours d’expériences et des pratiques d’autres entreprises dans un même secteur d’activité pour affiner la démarche
Pour les petites structures, envisager un regroupement pour des actions coordonnées

Déterminer ou clarifier les rôles de chacun dans l’entreprise

Insister notamment sur l’importance du rôle des premiers niveaux d’encadrement, des services de santé au travail, du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et des structures de soutien collectif (services sociaux, groupes de parole ou de soutien…)
Rappeler le rôle d’alerte que doit avoir chaque salarié

Déterminer des signaux ou des indicateurs d’alerte et de suivi

Donner des outils pour permettre à chacun de déceler une situation nécessitant d’intervenir
Faciliter l’évaluation ou l’impact de la démarche mise en œuvre

Travailler avec des relais extérieurs expérimentés

Préciser les démarches à adopter en cas de problème individuel

Définir quelles sont les conditions du retrait ou du maintien au poste
Faire le point sur la façon dont sont gérées les urgences individuelles en rapport avec des consommations occasionnelles ou répétées
Lister les relais externes qui assurent prise en charge et suivi
Rappeler les obligations et les responsabilités de chacun

Intervention en entreprise sur les addictions : clefs de réussite et écueils à éviter

Clefs de réussite

Impliquer tous les acteurs de la santé au travail et l’encadrement, avec appropriation de la problématique par la direction
Rappeler les rôles de chacun : tout le monde est concerné
Adapter le langage ou les approches à l’ensemble des salariés
Tenir compte des spécificités de l’établissement permet d’avoir une approche plus humaine et personnalisée.
Rassurer sur la légitimité d’une approche collective
C’est une problématique de santé et de sécurité au travail, et il est nécessaire d’échanger et de construire ensemble une charte de bonnes pratiques.
Convaincre qu’il est important pour chacun de lutter contre les attitudes d’évitement
Poser des questions, aider ou accompagner une personne en difficulté n’est pas intrusif. C’est une manifestation d’intérêt, une main tendue et cela contribue à renforcer ou restaurer le lien social en entreprise.
Rassurer l’ensemble du personnel sur l’absence de sanction encourue en cas d’appel au secours ou d’alerte
Bien expliquer la différence entre alerter et dénoncer
Ecueils

Rester dans une logique répressive ou de sanction
Intervenir en jugeant les comportements dits privés sans répercussion sur le collectif de travail

Assurer la promotion et la pérennité de la démarche
Une fois un discours collectif établi en concertation avec l’ensemble des acteurs de l’entreprise, il est important de le faire connaître, de le mettre en application et d’assurer sa pérennité. Il est donc primordial de mobiliser, d’informer et de former.

Mobilisation de tous les acteurs
La direction et l’encadrement doivent être porteurs de la démarche mise en place : y croire, la défendre, la promouvoir et assurer les moyens de sa pérennité. Par ailleurs, ils doivent donner l’exemple : respect de la confidentialité, discrétion dans les interventions ou les mesures prises, organisation de « pots » sans alcool…

Le CHSCT, les représentants du personnel, les services de santé au travail et les structures de soutien collectif (services sociaux, groupes de parole ou de soutien) doivent être partie prenante de cette démarche.
Précisons que les services de santé au travail ont un rôle spécifique à jouer : ils sont les détenteurs des informations permettant le suivi de l’état de santé des salariés et peuvent mettre en place des indicateurs pertinents pour évaluer l’évolution et les problèmes posés par des conduites addictives en milieu de travail (quantité consommée, fréquence de consommation, postes ou unités plus touchés que d’autres…), dans le respect de la confidentialité.
Tous les salariés sont de même invités à « jouer le jeu », en acceptant et en appliquant les modalités d’intervention établies de façon consensuelle.

Sensibilisation et information
Il faut faire connaître, diffuser largement et tenir à disposition la charte établie au niveau de l’entreprise à l’ensemble du personnel, y compris aux nouveaux embauchés ainsi qu’à tous les travailleurs temporaires (CDD, intérimaires, prestataires extérieurs).D’autre part, il est recommandé de rappeler régulièrement les rôles de chacun. Lors de ces rappels, il sera utile de faire connaître les numéros verts nationaux existants, ainsi que les sites Internet d’information « grand public ».

Numéros verts et sites Internet d’information sur les addictions
Tabac info service
0 825 30 93 10
Écoute alcool
0 811 91 30 30
Écoute cannabis
0 811 91 20 20
Drogues info service
0 800 23 13 13
Site Drogues et dépendances (MILDT)
www.drogues-dependances.fr
Pour connaître les autres sites d’information disponibles, notamment celui de l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA), consultez la liste des sites de références en fin de dossier.

Formation
La formation des médecins du travail dans le domaine des addictions (actualisation ou acquisition de compétences) est un des objectifs du Plan gouvernemental addictions 2007-2011.
D’autre part, afin de mieux faire comprendre les rôles à jouer et les responsabilités de chacun, la mise en place d’actions de formation, adaptées à chaque niveau d’encadrement de l’entreprise, sera utilement envisagée pour l’encadrement, les représentants du personnel et les salariés (par exemple, à base de jeux de rôle). Pour ce faire, l’entreprise pourra faire appel à des structures extérieures spécialisées.

Repérer les situations individuelles et savoir réagir

Il est important que chacun dans l’entreprise sache, après les avoir identifiées, réagir face à des situations individuelles susceptibles de mettre en danger un salarié ou son entourage, suite à une supposée consommation occasionnelle ou répétée d’une substance psychoactive.

Certains indices peuvent permettre de repérer de façon précoce (avant qu’il y ait mise en danger) les personnes en difficulté, avec une possible consommation de substances psychoactives.

Identifier et savoir réagir pour ne pas laisser une personne en difficulté

Préconisations pour le personnel d’encadrement et les salariés
Etre attentif aux personnes fréquemment absentes ou en baisse de « performance »
Informer ces personnes des possibilités de soutien au sein de l’entreprise (services de santé au travail, ressources humaines, services sociaux…), ou auprès de structures externes
Inciter la personne à aller consulter ou se faire aider en abordant éventuellement les enjeux professionnels, voire familiaux
Dans tous les cas, être à l’écoute des personnes en difficulté, sans tomber dans l’hyperprotection

Conseils pour le salarié en difficulté
Ne pas rester isolé
Ne pas hésiter à évoquer ses difficultés avec le médecin du travail, qui pourra orienter vers un accompagnement ou une prise en charge adapté
En parler notamment à son entourage professionnel proche

Certaines situations devraient faire l’objet d’une vigilance accrue. En effet, il semblerait que les consommations de substances psychoactives soient plus élevées ou plus fréquentes chez les personnes qui sont affectées à des postes à risque ou à fortes contraintes :

tâches à haut risque (métiers de sécurité, transports, sites à hauts risques industriels…),
métiers pénibles ou difficiles,
postes à fortes responsabilités…

La marche à suivre figure dans la charte établie collectivement pour la gestion et le suivi des addictions dans l’entreprise, y compris dans les situations d’urgence.

On considère qu’il y a urgence quand un salarié n’est plus capable d’assurer son poste, qu’il se met en danger ou met en danger son entourage professionnel ou lorsqu’un risque d’accident existe. Cette situation peut se caractériser par des gestes ou des attitudes inadaptés à la tenue du poste de travail, des propos incohérents, une démarche titubante, une désorientation, un état d’ébriété, un malaise…

Prise en charge de l’urgence : quelques pistes
Mise au repos
En cas de malaise, appel du sauveteur secouriste du travail et du 18, du 15 ou du 112
Appel ou visite au cabinet médical de santé au travail
Raccompagnement au domicile en s’assurant du relais de la prise en charge
Ces modalités d’intervention et de prise en charge doivent figurer dans l’organisation des secours de l’entreprise et dans la charte établie collectivement pour la gestion et le suivi des addictions

Cependant, cette réponse d’urgence ne peut répondre qu’à des problématiques ponctuelles. Elle n’a que peu d’efficacité à long terme. On peut souligner que les difficultés constatées à un niveau individuel peuvent constituer un signal d’alarme d’un problème plus large, et servir à la recherche de mesures de portée plus collective.

Contexte réglementaire

Les conduites addictives et certaines consommations occasionnelles peuvent être à l’origine d’accidents de travail ou d’autres risques professionnels (violences, harcèlement, stress…) en milieu de travail. Le Code du travail mettant l’obligation de sécurité de résultat à la charge de l’employeur, elles doivent être évaluées et prévenues :

prise en compte dans l’évaluation des risques,
intégration dans le document unique,
mise en place de mesures de prévention adaptées.

D’autre part, tout salarié doit respecter une obligation de sécurité, à l’égard de lui-même et des autres personnes concernées du fait de ses actes ou omissions au travail. Cette obligation concerne également les salariés qui interviennent temporairement dans l’entreprise (intérim, entreprise extérieure, CDD…).
Cette disposition concerne aussi bien le salarié qui a une consommation occasionnelle ou une conduite addictive, que ses collègues qui constatent ou supposent qu’il y a danger pour lui ou les autres à ce qu’il occupe son poste. A noter qu’un état ébrieux n’est pas nécessairement lié à la consommation d’une substance (alcool, médicament, drogue). Une réaction adaptée s’impose dans tous les cas (alerte et secours éventuels).

D’autres acteurs en santé et sécurité du travail dans l’entreprise ont un rôle à jouer :

CHSCT : devoir d’alerte, proposition d’actions de prévention adaptées…
services de santé au travail : dépistage, accompagnement, mise en contact avec des structures de soutien, retrait éventuel temporaire ou non du poste, alerte.

Rappelons qu’il existe également dans le domaine des conduites addictives :

des dispositions spécifiques du Code du travail (alcool)
des dispositions hors Code du travail :

interdiction de fumer sur les lieux de travail (Code de la santé publique)
alcoolémie et usage de stupéfiants au volant (Code de la route)
usage de substances psychoactives et aptitude à la conduite ou au pilotage (transports aériens, ferroviaires ou routiers)

Employeur : obligation de sécurité et responsabilités
L’obligation de sécurité pour l’employeur est prévue dans le Code du travail (article L. 230-2). Elle consiste notamment à évaluer les risques, à les retranscrire dans le document unique et à les prévenir.Les outils réglementaires à sa disposition pour prévenir les risques liés aux consommations occasionnelles (alcool, cannabis…) ou aux conduites addictives sont :

le règlement intérieur, ne pouvant aborder que les points relatifs à l’hygiène et la sécurité et à la discipline (article L. 122-34 du Code du travail)
les interdictions réglementaires de consommation :

pour l’alcool, interdiction d’introduire, de distribuer des boissons alcooliques, ou de laisser entrer ou séjourner des personnes en état d’ivresse sur le lieu du travail (article L. 232-2 du Code du travail)
pour les stupéfiants (cannabis, cocaïne…), interdiction générale de consommation (article L. 3421-1 du Code de la santé publique)
pour le tabac, interdiction de fumer sur les lieux de travail (articles R. 3511-1 à R. 3511-14 du Code de la santé publique)
des dispositions réglementaires autres, telles que le Code de la route, sur lequel il pourra s’appuyer en rappelant que la conduite en état d’ivresse, sous l’emprise d’un état alcoolique et/ou en ayant fait usage de stupéfiants est sanctionnée pénalement,
des moyens de contrôle ou de dépistage dans certaines conditions qui lui permettront d’envisager le retrait du salarié de son poste.

Son pouvoir de direction peut aller en cas de besoin jusqu’à la sanction et au licenciement pour remplir son obligation de sécurité (éviter la mise en danger du salarié, des collègues de travail).

Licenciement et conduite addictive : quelques cas de jurisprudence
Licenciement pour faute grave d’un salarié retrouvé en état d’ébriété dans l’enceinte de l’entreprise eu égard à ses fonctions ou à ses antécédents (chambre sociale de la Cour de cassation, 18 mai 2005)
Licenciement d’un mécanicien automobile en état d’ébriété sur son lieu de travail suite à un repas « bien arrosé », une mauvaise réparation pouvant mettre les clients en danger (cour d’appel de Reims, 8 septembre 2004)
Licenciement pour faute grave d’un salarié ayant consommé du cannabis sur le lieu de travail (cour d’appel de Montpellier, 7 avril 1999)

Rappelons que l’employeur a une obligation de sécurité de résultat. En cas de manquement à cette obligation, il peut être poursuivi pour faute inexcusable en cas d’accidents du travail ou de maladies professionnelles. Sa responsabilité pénale peut également être engagée (en cas notamment de non assistance à personne en danger, mise en danger d’autrui…). L’employeur est par ailleurs responsable des dommages que ses salariés peuvent causer à des tiers (article 1384 du Code civil).

Salarié : obligation de sécurité et responsabilités
L’obligation de sécurité pour le salarié est prévue dans le Code du travail (article L. 230-3). Il lui incombe « de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail ».

Dans certaines situations de consommation occasionnelle ou de conduites addictives où il existe un danger grave et imminent pour la vie ou la santé d’un salarié, les droits de retrait et d’alerte peuvent être mis en œuvre (articles L. 231-8 et L. 231-8-1 du Code du travail). A noter que la situation doit être appréciée strictement du point de vue de la santé et sécurité du travail, et non au regard de la morale ou d’un jugement de valeur quelconque.

En cas de manquement à son obligation de sécurité, il encourt une sanction disciplinaire et sa responsabilité pénale peut être engagée.

Obligation de sécurité du salarié : jurisprudence
Condamnation pénale pour non assistance à personne en danger de l’employeur et du salarié qui laissent un employé en état manifeste d’ébriété quitter le lieu de travail au volant de sa voiture et qui décède des suites de son accident de la route (cour d’appel de Lyon, 8 juin 2006)

Contrôle et dépistage
Les moyens de contrôle les plus couramment mis en oeuvre pour veiller à l’application des prescriptions du règlement intérieur sont l’alcootest, le dépistage biologique de stupéfiants et les fouilles de vestiaires.
La mise en œuvre de ces moyens de contrôle est strictement encadrée et résulte d’un « compromis » entre la nécessité de protéger les salariés et celle de respecter leurs libertés individuelles.
La mise en œuvre d’alcootests ou de dépistages biologiques de stupéfiants pour évaluer l’aptitude au poste peut faire partie des prérogatives du personnel soignant des services de santé au travail, dans le respect du secret médical.

Le contrôle de l’alcoolémie des salariés n’est possible que s’il est prévu au règlement intérieur, que sa contestation soit possible et définie, qu’il soit justifié par la nature de la tâche à accomplir et que l’état d’ébriété présente un danger pour les personnes ou les biens.

Le dépistage systématique d’usage de stupéfiants ne peut en aucun cas se justifier (avis du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CSPRP), 16 octobre 1989). Il ne peut concerner que des postes comportant de grandes exigences en matière de sécurité et de maîtrise du comportement.

En ce qui concerne les fouilles de vestiaires, la jurisprudence en admet le principe pourvu qu’elles soient réalisées dans les cas et aux conditions prévus au règlement intérieur, en présence du salarié ou celui-ci ayant été prévenu, et strictement à des fins de sécurité.

Pour en savoir plus, consultez les documents suivants :
Circulaire n° 90-13 du 9 juillet 1990 du ministère chargé du travail relative au dépistage de la toxicomanie en entreprise, publiant l’avis du CSPRP du 16 octobre 1989
Circulaire n° 5-83 du 15 mars 1983 de la Direction du travail (DRT) relative à l’application des articles 1er à 5 de la loi du 4 août 1982 concernant les libertés des travailleurs dans l’entreprise
Article « Dépistage des substances psychoactives », paru dans les Documents pour le médecin du travail (INRS)

Retrait du poste
Lorsqu’une consommation de substances psychoactives est mise en évidence et qu’elle est dangereuse pour le salarié ou pour son entourage, il n’existe pas de disposition réglementaire spécifique en ce qui concerne le retrait du poste. Rappelons cependant que le fait de délaisser une personne hors d’état de se protéger ou d’omettre de porter secours constitue des délits (articles 223-3 et 223-6 du Code pénal).

L’employeur ou l’encadrement peut prendre la décision de mettre temporairement le salarié au repos ou de le faire raccompagner à son domicile.

Il est également possible de faire appel au médecin du travail, à qui il appartient de conseiller l’employeur et d’apprécier l’aptitude à assurer le poste (articles R. 241-41 et R. 241-49 du Code du travail), et prescrire une éventuelle inaptitude temporaire.
En cas d’inaptitude définitive à occuper le poste, l’employeur doit envisager un reclassement et, si celui-ci s’avère impossible, le salarié risque le licenciement.

Ethique et non-discrimination
Les problématiques posées en milieu de travail par des consommations occasionnelles de substances psychotropes ou des conduites addictives ne doivent pas être appréhendées sous l’angle de la morale ou du jugement, mais en tant que conduites pouvant mettre en danger le salarié ou les tiers sur le lieu de travail.

Comme le rappellent les dispositions relatives au règlement intérieur, « il ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » (article L. 122-35 du Code du travail).

Un refus d’embauche ou un licenciement, motivé par l’état de santé, notamment dans le cas d’un abus nocif ou d’une dépendance à une substance psychoactive, pourrait être jugé discriminatoire (au sens de l’article L. 122-45 du Code du travail), sauf inaptitude constatée par le médecin du travail.

Dans le cadre du suivi médical d’un salarié, si une inaptitude est prononcée, le médecin n’a pas à en communiquer les motifs à l’employeur. Les informations recueillies par le médecin du travail sont protégées par le secret médical. L’indépendance du médecin du travail à l’égard de l’employeur est garantie par le Code du travail (article R. 241-30).

Les membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sont tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur (article L. 236-3 du Code du travail).

Au-delà des obligations réglementaires, la discrétion est de mise pour appréhender et gérer au mieux ce genre de situations.

Pour en savoir plus en quelques clics…
Documents INRS

DURAND E. « Médicaments psychotropes et travail (I) : traitements de substitution aux opiacés ». Dossier médico-technique. TC 111. Paru dans les Documents pour le médecin du travail, n° 108, 4e trimestre 2006, 20 p. (format pdf, 1 353 ko)
« Alcool, tabac… au travail : de bien mauvaises habitudes ». Dossier. Travail et sécurité, n° 667, novembre 2006, pp. 29-36 (format pdf, 800 ko)
DURAND E. « Conduites addictives et travail, journées de l’Institut national de médecine agricole (Lille, 6 et 7 octobre 2005) ». Compte rendu de congrès. TD 146 . Paru dans les Documents pour le médecin du travail , n° 106, 2e trimestre 2006, 13 p. (format pdf, 147 ko)
DURAND E., GAYET C., BIJAOUI A. « Dépistage des substances psychoactives ». Pratique et déontologie. TM 2. Paru dans les Documents pour le médecin du travail , n° 99, 3e trimestre 2004, 13 p. (format pdf, 138 ko)
« Lutter contre le tabagisme en entreprise » (dossier Web)

Sites d’information

Site Drogues et dépendances (MILDT)
www.drogues-dependances.fr
Plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites
www.drogues.gouv.fr
« La prise en charge et la prévention des addictions. Plan 2007-2011 ». Ministère chargé de la Santé, 2006, 19 p. (format pdf)
www.sante.gouv.fr/htm/actu/plan_addictions_2007_2011/plan_addictions_2007_2011.pdf
Grandes orientations des plans de l’Union européenne
www.emcdda.europa.eu
Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA)
www.anpaa.asso.fr
Ensemble, arrêtons le tabac (site interministériel)
www.tabac.gouv.fr
Tabac info service
www.tabac-info-service.fr
Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)
www.inpes.sante.fr
Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT)
www.ofdt.fr

Autres références bibliographiques
« Conduites addictives et risques professionnels en Europe. Paris, le 20 octobre 2006 ». Actes des Débats d’Eurogip. Eurogip, 2006, 32 p.
« Addictions en entreprise ». Actes des Assises nationales de la prévention du 3 mai 2006. Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA), 2006, 12 p.
FONTAINE A. « Double vie. Les drogues et le travail ». Les Empêcheurs de penser en rond / Le Seuil, 2006, 216 p.
« Alcool et travail ». Numéro spécial. Performances. Santé et fiabilité humaine, n° 28, mai-juin 2006, 48 p.
« Evaluation des risques professionnels. Gérer les risques liés aux consommations de substances psychoactives ». Actes du colloque du 7 juin 2005. Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA), 2005, 63 p.
« Drogues et travail : le new deal ? ». Numéro spécial. Toxibase, n° 15, 3e trimestre 2004, 56 p.

www.inrs.fr

par Multiforse